Interview: Martin de Junon

Après quatre années de hiatus, le post-hardcore de General Lee renaît avec Junon. “Junon” comme la déesse protectrice de Rome, mais surtout “Junon” en référence à l’un des premiers titres composé par le groupe en 2003 (et présent sur « The Sinister Menace« ). « The Shadows Lenghten » promet déjà une vingtaine de minutes d’un mélange hardcore, de post-rock et de mélodies soutenu par une palette de chants toujours plus variée. Le tout dans un univers inspiré par la littérature fantastique et par le combat perpétuel de la planète face aux attaques répétées de ses hôtes. C’est Martin du groupe qui a gentiment répondu à nos questions… 

 

RiskTheDeath : On va reprendre un peu depuis le commencement et notamment à vos débuts, vous aviez déjà un groupe. Donc donc pourquoi avoir décider de mettre fin à Général Lee, surtout après 4 albums ?

Martin : Bah si tu veux, en fait donc Général Lee existe depuis des années 2000 et on a fait pas mal de choses, il pas mal de line-up et puis au bout d’un moment ça s’est un petit peu souffler : il y a eu un tournant au niveau de nos vies personnelles. Par exemple, moi j’ai eu mon premier enfant à cette période-là… On a tous une bonne raison de ralentir un petit peu les concerts, les répète, ce genre de choses… Et puis, il y a un guitariste qui est parti dans le sud-ouest et le bassiste à Nantes, donc on s’est dit que c’était peut-être la période pour arrêter, enfin voilà… Le moment était peut-être venu d’arrêter le groupe.

RTD : Vous avez choisi Junon, pour le nom de ce nouveau groupe : justement ce choix est-il en référence à votre titre phare du premier album (« The Sinister Menace ») de General Lee ?

Martin : Exactement. Donc on a voulu changer de nom et plutôt que de trouver un nom gratuit, on a dans un petit peu piocher dans notre histoire… Voilà, parce qu’on est toujours les mêmes, même si on a splinté il y a 5 ans… c’est la même ligne créative que créatrice. Donc on s’est dit que plutôt de de trouver un nom gratuit, on allait faire référence à notre histoire et « Junon » c’est un titre qu’on a très fréquemment jouer en concert, donc on s’est dit que le choix était plutôt raccord et que ça pouvait ça pouvait fonctionner.

RTD : Le groupe est composé de 3 guitaristes, c’est quelque chose qu’on l’on voit assez rarement et qui est plutôt inhabituel surtout dans un groupe de post-hardcore : pourquoi avoir fait le choix d’intégrer 3 guitaristes dans votre musique ?

Martin : Si tu veux à la base, c’était lors du deuxième album, où j’ai intégré le groupe en tant que troisième guitariste. Et dans même cette période, il y a aussi un claviériste qui a intégré le groupe, donc on était 7. Et si tu veux c’était plus une bande de potes, en fait… donc on a décidé de créer ensemble de la musique. Tu vois, trois guitariste ça permet aussi de faire pas mal évoluer les mélodies, ce qu’on l’a toujours fait finalement. Donc il n’y a pas… si il y avait un besoin, mais ce n’était pas forcément nécessaire mais ça nous permet peut-être d’aller un peu plus loin dans les compositions.

RTD : Votre premier EP de 4 titres, « The Shadows Lengthen » sortira la semaine prochaine (ndlr : le 9 février) et s’inspire de références fantastiques : de ce fait, quels sont les thèmes de cet EP ?

Martin : Alors les thèmes abordés, c’est principalement sur le chant. Parce que c’est vrai, nous quand on compose, le chanteur est toujours avec nous. Chacun donne un peu son avis et on modifie selon les idées. Mais généralement c’est la musique qui est écrit en premier, ensuite le chanteur vient poser ces textes. Et donc c’est vraiment… Enfin voilà, c’est lui qui gère un peu plus les paroles, le nom des titres et ce qu’on raconte dedans. Ça a toujours été comme ça, même dans Général Lee. On avait des textes généralement assez sombres et toujours inspirés par Lovecraft ou Poe. Ça a toujours été un peu l’univers que je chanteur a voulu donner au groupe, que ce soit pour Général Lee ou pour Junon. Enfin voilà dans les thèmes, il y a toujours très souvent l’apocalypse, la destruction…

RTD : La destruction de la planète par ses hôtes…

Martin : Oui, forcément un peu comme tout le monde ce sont des choses qui nous marquent personnellement et aussi dans nos lectures. On aime aussi le fantastique, et je pense que c’est ce qui nous pousse à écrire ce genre de choses. Même au niveau de la musique, parce que même si les paroles viennent qu’après… nous c’est quelque chose qui nous inspire et je pense que que cela se transmet aussi au chanteur. Le cinéma d’horreur, les attaques contre la planète et l’environnement la pollution… Ce sont vraiment des thèmes récurrents dans cet EP là, et de façon générale dans nos albums.

RTD : L’artwork semble représenter des crânes de chevaux : est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ?

Martin : Alors, au début on voulait travailler avec un photographe mais en raison du confinement et de toutes ces règles, on n’a pas pu réellement exploiter ce genre de possibilités. Donc on a voulu essayer de retranscrire un petit peu justement ce qu’évoque la musique. Donc on a choisi ce côté « artistique » qui représente des crânes, le désert car finalement ce sont des choses qui sont plus ou moins récurrents dans ce qu’on crée. Un aspect un peu granuleux, avec des textures qu’on a pu ajouter sur la pochette.

RTD : On va parler plus musique à proprement parler, maintenant. Donc « Carcosa » est le premier titre que vous dévoilé : est-ce qu’on peut dire qu’il a été choisi parce qu’il montre bien les différentes facettes du groupe ?

Martin : Ce choix a été fait pour plusieurs raisons et notamment grâce à la composition. Les 3 autres titres de l’EP ont été composé plus ou moins ensemble, car on a pu se voir avant le confinement pour bosser et répéter ces titres là. « Carcosa » est venue spontanément, c’est quelque chose qu’on avait bossé sans se voir… quand on l’a enregistré on était agréablement surpris et notamment sur le changement au niveau du chant. Je ne sais pas si tu connais un peu l’histoire du groupe mais le chant clair ou chanté n’a jamais vraiment été présent. Et finalement ça a été une très bonne surprise. Donc on s’est dit finalement que c’était un titre assez impactant et qui allait droit au but, donc c’était logique de l’utiliser en tant que premier single.

RTD : Les paroles de ce morceau sont tirées de la nouvelle « The King in Yellow » de Robert W. Chambers : cette nouvelle a-t-elle une signification particulière pour toi ou le groupe ?

Martin : Alors là il faudra demander au chanteur. Mais c’est quelque chose qui est tiré de Lovecraft et aussi de la série « True Detective » (c’était pendant la saison 1). C’est quelque chose qui nous plaisait et, même graphiquement. On en a discuté avec le réalisateur du clip justement, on trouvait ça aussi esthétiquement jolie de jouer avec ça.

RTD : Ce clip a été réalisé par Eloi Casellas, et tourné au belvédère de Frac de Dunkerque : est-ce que cela vous tenez à cœur de filmer dans votre Région, ou est-ce que c’était seulement une opportunité ?

Martin : C’était plutôt une opportunité. Après le studio, on est parti à la résidence aux 4 écluses, ce qui nous a permis aussi de bosser le set, y comprit des chansons composées 6 mois auparavant. et même « Carcosa » qu’on avait finalement jamais joué ensemble. On est resté 3 jours là-bas. Les résidents nous ont fait un peu découvrir Dunkerque. Ils nous ont parlé un peu du bunker miroir mais également du belvédère qu’il y a, en haut de la FRAC. On s’est renseigné parce que la personne avait un contact, on s’est quand même dit que ce serait génial de tourner un clip là-dedans. Donc en soit, ça nous tenait pas forcément à cœur de tourner un clip dans la région, mais c’était plus une opportunité qu’on avait. On s’est dit que c’était plutôt chouette de tourner là. C’était aussi peut-être une solution de facilité, parce qu’une partie du groupe mais aussi l’ingé light, sont originaires de de la région lilloise. Je pense que c’était un côté pratique qui nous a grandement simplifier la tâche aussi…

RTD : Vous revenez après 4 ans d’absence : la scène vous a-t-elle manqué ?

Martin : Si tu veux, pour diverses raisons personnelles on a arrêté le groupe il y a 4 ou 5 ans, mais on toujours voulu refaire de la musique ensemble. Finalement ça nous manque, parce que le groupe c’est vraiment un groupe d’amis ; on ne s’est pas réuni grâce à la musique, on était déjà des amis à la base. Donc forcément ça nous manquer de nous voir, de composer ensemble… Finalement les tournées et les lives, c’est vraiment pour être ensemble. Oui, ça nous manques ! Mais on va continuer à avancer dans ce sens-là (rires). On court un peu après les lives, mais il n’y a pas beaucoup d’ouverture, en ce moment… On va continuer notre petit chemin, on va essayer de composer et de faire la promo de ces 4 titres déjà.

RTD : Vos amis de The Lumberjack Feedback, vous ont mis à disposition leur salle de répétition et prêté leur matériel : est-ce qu’on peut dire qu’ils sont vos super-héros et qu’ils ont relancé votre carrière ?

Martin : (rires) Relancer notre carrière, c’est peut-être un grand mot, surtout avec le changement de nom. Mais c’était plutôt cool ! Dans ce style de musique on se connaît un peu tous, et ils nous ont vraiment filer un coup de main en nous permettant de répéter. On répéter à 3, alors qu’on est 6 à la base. Ils nous ont laisser un petit créneau, quand ils n’étaient pas là, donc c’était plutôt cool de nous laisser faire ça. D’ailleurs, c’est le batteur de The Lumberjack Feedback qui nous a aidé à enregistrer les maquettes des batteries. On a dû faire une dernière répète en décembre 2019 là-bas, on a enregistré quelques maquettes, donc ça fait pas mal de temps sans jouer. Oui, c’est vrai qu’ils nous ont pas mal aidé, mais on peut dire que ce sont des super-héros à nos yeux, car ils nous ont aider à avancer sans perdre trop de temps. Si on attendait une fenêtre d’ouverture pour répéter ou enregistrer, on en serait pas là…

RTD : Pour finir cette interview, parlons avenir : comment voyez-vous le futur de Junon ou tout simplement de la culture et de la musique, en cette période incertaine ?

Martin : De toute façon là, on subit. On a pas de d’autre choix que de subir. De notre côté on prend ce qu’il y a à prendre, c’est ce qu’on a fait depuis le début, c’est-à-dire qu’on nous a proposé des résidences on les a fait., potentiellement un showcase (qu’on a dû annuler en raison des restrictions). C’est dommage ! Mais nous de toute façon on continue d’avancer, on continue de faire la promo, on va sortir un vinyle, on continue de composer. Peut-être qu’en fin d’année on aura toujours pas fait le concert, mais on aura un album. Après j’en ai aucune idée… Après je pense que c’est pareil pour la culture, tout le monde est à l’affût des dates, des concerts, et même de pouvoir ressortir. Mais ça… je pense qu’il y a que le temps qu’il fera les choses, je ne vois pas d’autres possibilités… je pense qu’il faut attendre, et on verra bien.

RTD : C’est une période difficile. Et si on vous propose un streaming live est-ce que vous serez partants de le faire ? Est-ce que par rapport à la localisation géographique de l’ensemble des membres du groupe, vous avez l’opportunité de pouvoir éventuellement réaliser ce genre de format ?

Martin : Potentiellement oui. C’est vrai qu’on avez réfléchi à ça lors de notre résidence à l’arc-en-ciel de Liévin. Et encore plus avec le showcase annulé. On se dit pourquoi pas réfléchir un live stream. Mais c’est particulier, ça nécessite déjà une bonne cohérence et de bien répéter car on n’a jamais fait de live avec nos nouveaux titres. Mais bon live streaming, on y croit pas trop parce que… car même les groupes qu’on écoute ont sorti des live streaming (parfois payant parfois gratuit). Mais pour nous, en tout cas pour notre partie, on n’est pas vraiment friand de live streaming. Par contre, on est beaucoup plus pour les lives radio. On a changé de nom, mais les fans qui nous connaissait sous le nom de General Lee nous suivent toujours avec Junon. Après c’est plus un problème d’ état d’esprit, pour nous les lives ce sont des lives, les lives streaming c’est difficile… surtout dans notre style qui est assez visuel. Pour nous faire un live streaming sans public, ça ne vaut pas trop le coup. Ce qui vaut plus le coup, c’est ce que je te disais, ce sont des lives en conditions radio, tu es posé et tu joues ton titre et voilà…

 

En remerciant, Romain de l’Agence Singularités; Junon et particulièrement Martin pour son temps et ses réponses…

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