Interview: Philippe de Porn

Le 5 Avril dernier, le surprenant Philippe Deschemin de Porn, est venu nous donner des nouvelles de Mr.Strangler. Une interview centrée sur le nouvel album du groupe: album considéré comme le dernier acte du thriller…

 

RiskTheDeath: Vous tirez votre nom du groupe The Cure : mais je suis sûre que vous prenez un certain plaisir à nous voir vous chercher sur les réseaux ?

Philippe: Absolument ! The Cure est une grande influence. Enfant, j’ai énormément écouté le groupe. Un peu moins ces dernières années, certainement pour mieux y revenir. Il y a 20 ans, nous n’avions que les médiathèques pour découvrir des disques. Avec internet, cela a changé et j’adore découvrir de nouvelles choses. J’écoute beaucoup de musique, peut peut-être 3 à 6 heures par jours… J’explore et tente de découvrir comme le ferait un historien: la genèse de tel ou tel groupe, quels groupes ont façonné tel ou tel style musical. Même dans la musique j’applique une forme de matérialisme dialectique et historique ! Pour comprendre un groupe, il faut comprendre ces influences. Je me souviens encore de la première fois où on nous a appelé PORN. C’était tellement bizarre… Nous avions loué une salle de répétition dans le sud de la France, à Nyons. Cela devait être en Juillet, nous étions en vacances, à l’époque étudiants, nous nous retrouvions dans notre région natale. Le responsable de la salle de répète est arrivé et nous a dit « C’est vous les PORN ? ». Nous sommes regardé et on répondu « Ouais » . Ce devait notre même pas notre 5ème répète, pas de concerts encore… On répétait « Soft Machine Porn Machine » et « Recycle » que je venais de composer, après 2 semaines d’apprentissage de la guitare… C’est un nom étrange. Il nous apporte beaucoup d’inimité. Il y a d’un coté, les bien-pensants  de la vertue et de la morale qui nous attaquent pour être des apôtres du mal, des illuminatis (ce à quoi nous plaidons coupable); et d’un autre côté, les bien-pensants de la « rebellitude » (souvent membre de groupes musicaux médiocres, ou groupies de groupes musicaux médiocre) qui en réalité sont simplement jaloux de ne pas avoir un groupe du nom de PORN. Pour ce qui est de chercher le groupe sur internet. Comme c’est un groupe de musique, il me paraît évident qu’il faut nous chercher sur un réseau adapté : spotify, youtube, deezer… Un peu comme avec le pain que l’on trouve à la boulangerie.

RTD: Vous définissez votre musique dans le style « murder rock » : quelles sont lescaractéristiques de ce style ? Est-ce qu’on peut dire que vous êtes fascinés par les tueurs en série ?

P: Non, je ne suis pas plus que cela fasciné par les tueurs en série. Contrairement à certain, ce n’est pas un fond de commerce, donc je les vois comme ils sont, c’est-à-dire souvent misérables et inintéressants. Ce qui est intéressant, c’est la fascination des gens pour eux. Je suis en revanche fasciné par la mort. Pas en tant que telle, mais dans le rapport que nous avons à elle et à la vie. L’humain se comporte comme une vache insouciante que l’on mène à l’abattoir. La mort est inévitable et pour autant elle est totalement absente des choix que nous faisons quotidiennement, et souvent on s’entend dire « oui mais si on pense à la mort, on ne vit plus » . Alors qu’en réalité il faut penser à la mort, non comme un risque (principe de précaution) mais comme une fatalité et vivre réellement. Quitter son job merdique, son conjoint qu’on déteste… partir à la rencontre de la vie. Un peu comme ce jeu d’enfant « tu ferais quoi si tu avais plus qu’une semaine à vivre ? ».

©Vdpictures

RTD: On décrit vos albums comme étant un mélange entre le metal indus de Marilyn Manson et le groove de Type O Negative : ces groupes sont-ils des influences pour vous ?

P: Indéniablement. Ce sont des groupes que nous aimons. Nous travaillons en ce moment avec Chris Vrenna, le batteur de NIN jusqu’à « The Fragile« . Il a bossé sur « Antichrist Superstar » de Manson et a produit deux albums pour lui, il y a quelques années. Nous sommes très honorés de bosser avec lui, c’est très enrichissant. Type O Negative est un groupe incroyable. Je me souviens de la sortie de « Bloody Kisses« , c’était une claque. La voix de Peter Steele est incroyable…

RTD: Vous avez mis en place une trilogie qui a commencé avec l’album « The Ogre Inside – Act I », où on assiste à la naissance de Mr. Strangler qui laisse ses pulsions sombres et inavouables prendre le dessus, puis avec « The Darkest of Human Desires – Act II », où on assiste à ses meurtres sanglants ; ce nouvel album « No Monsters in God’s Eyes – Act III » vient clôturer ce triptyque : même si l’artwork est évocateur, qu’arrive-t-il à Mr.
Strangler ?

P: Mr Strangler se fait attraper et condamner. Ce sont en quelque sorte ces derniers jours en prison et en psychiatrie.

RTD: Littéralement le titre de ce nouvel album signifie « pas de monstres dans les yeux de Dieu » : ce rapport la religion signifie-t-il finalement que même le dernier des meurtriers est la création de Dieu; d’autant plus que Mr. Strangler affirme que Dieu est le responsable de ses actes ?

P: Il ne dit pas que Dieu est responsable de ces actes. Contrairement a beaucoup de minables tueurs en séries. Strangler assume ce qu’il est. Il se considère totalement responsable. En revanche, il pense accomplir la volonté de Dieu. En réalité, d’un point de vue religieux: tout ce qui est, l’est par la volonté de Dieu. Ainsi, Strangler est la volonté de Dieu. Le pire des monstres est la volonté de Dieu. Quand on réfléchit à tout cela, ça devient un casse-tête pour les religieux. Ainsi, on invente des démons, etc… Mais, si Dieu est tout puissant, il pourrait éradiquer toutes ces forces du mal. S’il ne le fait pas c’est soit qu’il est d’accord avec ça, ou bien qu’il n’est pas tout puissant…

RTD: Cet acte III a donc un côté sombre ; ce sont les derniers instants de Mr. Strangler et pourtant la chanson « Lovely Day » paraît joyeuse : est-ce qu’elle ne symboliserait pas finalement l’acception de son destin ?

P: Dans ce morceau, Strangler exprime une forme de joie interieur en effet. En prison, un petit rien peut égayer une journée. Là c’est la perspective d’une évasion. Et parfois, le lendemain vous pouvez être au plus bas, comme dans « Low Winter Hope« .

RTD: Dans votre 2ème album, vous avez incorporé des paroles de serial killers (comme Charles Manson, Richard Ramirez, Gérard Schaefer) : l’avez-vous fait dans ce 3ème volet ?

P: Non, nous voulions nous focaliser sur Strangler. C’est un album plus introspectif, comme une entrée dans son esprit.

RTD: L’ensemble du mastering de cet opus a été réalisé par Brian Lucey au Magic Garden Mastering, sauf pour « Last Words » : pourquoi ce choix ? De plus, quels sont les derniers mots de Mr. Strangler ?

P: Brian Lucey a bossé avec Ghost, Manson, Depeche Mode mais aussi beaucoup  de groupes plus récents comme Royal Blood, par exemple. Il a un background très rock. Nous souhaitions une approche moins metal pour cette album. Les derniers mots de Strangler sont un appel à continuer son œuvre. À vivre quoi qu’il en coûte, et à la vengeance. Et ses derniers mot on été entendu.

RTD: « Lovely Day » a été remixé par le groupe Combichrist : d’autres remixes sont-ils en préparation ?

P: Absolument ! Nous avons l’honneur d’être remixé par Stabbing Westward, Orgy, Chris Vrenna de NIN, Jimmy Urine de Mindless Self Indulgence, The Anix, Lluther… Nous sommes extrêmement fiers !

RTD: Maintenant que « cette page est tournée » : pour les prochains albums, comptes-tu remettre en place ce genre de mise en scène ? Si oui, as-tu déjà une nouvelle histoire en tête ?

P: Comme je te le disais: l’appel de Strangler a été entendu. Une étrange communauté, menée par un homme appelé The Guide a fait de Mr Strangler un messie. Ils vont de ville en ville et à chaque arrêt, sont rejoins par de nouveaux fidèles. Des personnes abandonnant leur quotidien et souhaitant donner un sens à leur vie. La communauté, appelé Les Strangelings grandi et grandi…

RTD: Un dernier mot pour finir cette interview ?

P: Nous sommes PORN, vous êtes PORN !

RTD: En te remerciant pour tes réponses. Bonne continuation dans les projets futurs de Porn…

 

En remerciant, Porn et précisément Philippe Deschemin pour ses réponses apportées aux questions du webzine…

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